L'ANIME... OU COMMENT LA LÉGENDE A PRIS FORME !

L'adaptation de Saint Seiya en anime était un pari très risqué, il faut bien le reconnaître. Le style de Kurumada en rebutait plus d'un et on craignait le pire pour Saint Seiya tv. Mais qu'est-ce qui a réellement poussé Yoshifumi Hatano et les autres producteurs à vouloir absolument adapter cette oeuvre ? Son contenu, bien évidement... Le scenario parvenant à lui seul à justifier toutes les attentions !

Les grands moyens !

"Le metteur en scène Morishita, le directeur d'animation Araki et le responsable des décors ne se découragent pas devant un planning surchargé. Nous allons essayer de faire vivre les personnages dans l'animé. Chaque personne de l'équipe se donne à fond dans sa spécialité. Je suis certains que cela aboutira à de bons résultats. Vous pouvez me faire confiance !"

Ces quelques mots, bourrés d'entrain et de volonté, émanent du producteur de la série auprès de la Toei Dôga, Yoshifumi Hatano. Il savait déjà que le résultat final irait au delà de toute espérance. Pour ce faire, les petits plats ont été mis dans les grands : On engage Shingo Araki et son double Michi Himeno au design, Takao Koyama au scenario (lequel élabore le plan des 73 épisodes du sanctuaire. Il sera ensuite rejoint par l'excellent Yoshiyuki Suga pour les 41 derniers épisodes) et Seiji Yokoyama aux musiques ! Le projet créé un véritable phénomène au sein de la Toei, tout le monde semblait passionné par son travail. L'utilisation de nouvelles techniques de pointes pour l'animation de l'époque (1986) contribua également à l'excitation générale.

Kôzô Morishita, metteur en scène des 73 premiers épisodes de la série, puis Series Director chargé de la production, nous confie : "L'animation a connu de nombreuses évolutions techniques, notamment en ce qui concerne la prise de vue des images de fond. L'ordinateur est maintenant aussi utilisé et des personnes très compétentes travaillent dans ce domaine. Il est pourtant rare de trouver des oeuvres qui permettent d'exploiter ces techniques au mieux. Saint Seiya était le produit que nous attendions depuis des années car pour retranscrire à l'image ce qui se dégageait du manga, il fallait faire appel à des techniques de pointe, autant qu'à un dynamisme et une passion à la hauteur de l'oeuvre originale."

Le travail débuta par le passage au crible du scenario. De nombreux détails furent ajoutés au fur et à mesure de façon à rendre l'univers des saints plus crédible aux yeux des téléspectateurs, notamment concernant la description de la vie de tous les jours... De plus, des points du scenario ont été modifiés pour pallier à certains "raccourcis" du manga. En effet, un lourd problème se présentait aux producteurs de l'anime. Ce dernier et le support papier de Kurumada étant produit en même temps ou presque, et le scenario d'un épisode devant être remis impérativement trois mois avant sa production, on arriva rapidement à une situation de bloquage néfaste ! Donc, pour éviter de rattraper le manga, de nombreux personnages ont été créés de toutes pièces, et de nombreux moments du manga n'ont pas été repris dans la version animée, tout ceci entraînant parfois des "conflits" parfois grossiers avec l'histoire originale. Par contre, certains délires de l'auteur comme l'histoire des 100 enfants de Kido et la relation fraternelle entre tous les Bronze Saints ne nous ont pas fort manqué dans l'animé, il faut l'avouer !

Gaffes, bévues et boulettes ?

Le Crystal Saint, par exemple, maître de Hyoga dans l'anime, est inexistant dans le manga, dans lequel Camus chevalier d'or du Verseau occupe cette fonction. Les scénaristes parviennent tout de même à retomber sur leurs pattes, en faisant passer Crystal pour l'élève de Camus. Les fans hurlent cependant au sacrilège, clamant que l'existence de Crystal amoindris considérablement le lien entre Hyôga et Camus. Autre exemple, moins "clair", du moins pour ceux qui ne connaissent pas du tout le manga : Dans ce dernier, Ikki rencontre Shaka, avant leur combat "officiel" au Sanctuaire... Le néo-chevalier de bronze se fait sévèrement atomiser et le Gold Saint l' informe qu'il oubliera cette rencontre, mais que si d'aventure ils devaient se rencontrer à nouveau, il éprouvera une peur-panique incontrôlable ! Dans l'anime, cette première rencontre n'est pas évoquée ! Elle est pourtant essentielle pour comprendre la crainte irraisonnée qui s'empare d' Ikki. L'animé se rattrape et imagine les épisodes très controversés des disciples de Shaka...

Parmis ces exemples, le plus connus est peut-être celui de la Gold Cloth du Sagittaire. On sait tous que Kurumada ne souhaitait pas au départ plusieures armures d'or dans son histoire. Puis, constatant le succès de son manga, il changea son fusil d'épaule et en inventa 11 autres ! Il redessine par la même occasion l'armure du Sagittaire, jugée (à juste titre) trop laide. Mais encore faut-il expliquer logiquement ce changement soudain de look. Kurumada nous explique que la Gold Cloth du sagittaire première du nom est bel et bien la véritable Gold Cloth mais que Mitsumasa Kido l'avait jadis "maquillée" pour tromper ses ennemis. Explication qui ne brille pas par son originalité ou sa cohérence. Dans l'anime, c'est encore pire, vu que le changement est reste carrément inexpliqué ! Et que dire alors des Steel Saints, créés et imposés par Bandaï, qui disparaissent aussi vite qu'ils sont arrivés ... Sans laisser de traces !

Autant de petits ajouts ou suppressions scénaristiques qui ne plaisent pas à tous les fans.

A la fin du Sanctuaire, pour ne plus devoir surveiller sans cesse le manga, les scénaristes émérites de Saint Seiya, Takao Koyama et Yoshiyuki Suga créèrent même une période entièrement inédite dans le manga: Asgard , assez controversée.

Il est clair qu'au niveau scenaristique et graphique , Saint Seiya-l'anime n'atteint pas un degré de fidélité d'adaptation égal à un DBZ, par exemple, où tout est reproduit comme dans le manga (design, plans,...) !

 

Des qualités graphiques indéniables !

Le design, justement, tient certainement une place prépondérante dans le succès de la série ! Confié à deux personnes qu'on ne présente déjà plus, Shingo Araki et son assistante Michi Himeno, qui sont pour moi les deux meilleurs character designer qu'il m'ait été donné de connaître ! Tous les personnages ont été retravaillés et redessinés savament, pour le plus grand bonheur des yeux ! Le pauvre Kurumada, au style plus que dépassé, se voit dès lors reçevoir un paquet de critiques supplémentaires sur la qualité de ses dessins au regard de celui produit pour la série télévisée.

Le Character-designer nous livre ses premières impressions au contact de Saint Seiya : "Lorsqu'on travaille sur un animé, on entretient toujours une relation très étroite avec l'oeuvre originale dont il s'inspire. Travailler sur un animé, c'est toujours une course contre la montre, surtout quand il s'agit d'une nouveauté. Il était devenu rare que l'on puisse porter un regard approfondi sur le manga. Lorsqu'on m'a annonçé que j'allais travailler sur une nouvelle série basée sur un manga du nom de Saint Seiya, paraissant dans Shônen Jump, je me suis plongé dans le manga et l'ai lu attentivement. Cela ne m'était pas arrivé depuis longtemps. J'ai d'abord eu l'impression d'avoir été pris de court : l'histoire et la situation des personnages m'échappaient, je ne comprenais pas comment tout cela fonctionnait. Puis, après plusieures lectures, j'ai perçu ce que Seiya essayait de transmettre : derrière ses combats, il y avait quelque chose, le Cosmos. Je me suis alors décidé, nous allions faire jaillir la puissance de Seiya avec nos propres mains !"

Malheureusement, tous les épisodes ne sont pas signés Araki ou Himeno (loin de là !), et nous avons dès lors droit à certains épisodes horribles (nous retiendrons principalement le massacre de Shizuo Kawai sur les disciples de Shaka et le dernier épisode de Hyôga face à Milo), médiocres, potables ou justes bon. Mais qu'importe, le scenario est toujours là, gavé d'émotions pures, de bons sentiments, de combats titanesques et haletants... Tout cela rythmé ou berçé, selon les scènes, par les musiques tout simplement divines de maître Yokoyama ! Que demander de plus ?

Les armures...

Comme je vous le disais plus haut, tout le design a été repris en main. Et les armures n'ont pas fait exception à la règle ! Sous la patte d'Araki, elles offraient un look plus "esthétique" que celui produit par Kurumada. Ce changement de peau pour les Saints a été imposé par Bandaï, car les armures dessinées par le mangaka se révelaient pas assez commerciales ! Et ce changement a pour conséquence d'établir une petite "incohérence" avec le petit monde de Saint Seiya puisque nos Chevaliers de Bronze héritent d'une armure à protection intégrale à l'instar des Gold Saints, or la hiérarchie qui régit la chevalerie (et la logique) veut qu'un Chevalier d'or soit beaucoup mieux protégé qu'un Chevalier de Bronze ! Mais c'est un vaste débat entre fans... !

Ces premières moutures que portent les Saints de Bronze (les plus connues par les afficionados de la série), seront utilisées pendant toute la période du Sanctuaire.... Après quoi, les armures étant détruites après la Bataille face à Saga, les producteurs retombent habilement sur leurs pattes en renouant avec le manga et les armures de Kurumada pour l' épopée nordique d'Asgard (le manga de Kurumada entamait déjà la bataille face à Poseïdon). Ce sera la dernière mutation des armures de nos héros... Du moins dans l'anime ! Dans le manga, par contre, les changements d'armures sont assez fréquents et "logiques".

Il est d'ailleur dommage que les scénaristes et producteurs de l'anime n'aient pas pris cela en considération car après tout, l'évolution des Cloth est naturelle puisqu'elles sont des entités vivantes, se restructurant harmonieusement avec le cosmos de leur propriétaire.

Dream Team !

 

Autre pion essentiel de l'animé : Tadao Kubota ! Sous ce nom se cache le génialissime chef-decorateur de Saint Seiya ! Membre d'un très célèbre Studio au japon, il réalisa les décors pour Arrow Emblem Grand Prix no taka (Grand Prix), Versailles no Bara (Lady Oscar), Hi ! Step Jun (Vas-y Julie !), Sailormoon, Aoki densetsu Shoot !, Sangokushi (série de trois OAV dont la bande-son est signée Seiji Yokoyama !), Captain Harlock (Albator), Galaxy Express 999... Un très grand monsieur ! Sur Saint Seiya, le chef-decorateur suit les directives de l'Enshutsu (à savoir Metteur en scène ou directeur technique), lequel l'informe du genre de plans nécessaires pour une scène. Tadao Kubota a notamment dirigé l'équipe chargée des dessins sur 63 des 67 premiers épisodes de la série !

Sur Asgard série tv, deux décorateurs très talentueux éclatent au grand jour dans l'équipe ! Tadao Kubota étant très pris sur Shinku no shônen densetsu (Abel), Minoru Ookôchi et Yoshiyuki Shikano réaliseront une part importante des superbes décors enneigés de cette mini-série ! Un must !

Saint Seiya, c'est un staff de rêve ! Les meilleurs à chaque poste ! Du travail le plus méconnu au plus "médiatique", toute l'équipe s'est donnée à fond ! Saluons donc les Yasuhiro Yoshikawa (montage), Isao Hatano (ingénieur du son / montage), les animateurs/trices Kazue Kishita, Kyôkô Chino (membre des Studio Araki prod.)et Katsuya Nakamura, Yasuyuki Konno aux effets sonores, Masahiro Hosoda (assistant-réalisateur), Yasuno Satô (Sélection musicale), Shigeyasu Yamauchi (Réalisateur),... et tous les autres qui ont réussi à faire de Saint Seiya une série splendide et éternelle ! Amen !

Pour accéder à la Galerie de portraits des principaux membres du Staff, c'est ici !

Les voix ...

Le Doublage nippon, excellent sans être exceptionnel, s'avère tout de même la plupart du temps largement plus convaincant que le doublage français (que je vénère !), et contribue lui aussi à la bonne marche de l'ensemble. Pour plus de détail, reportez vous à la section doublage...

Succès mérité !

Résultat des courses ? Après des débuts difficiles, la série cartonne au Japon, où elle obtient même la première place de l'Anime Grand Prix 1988 (Classement élaboré par les lecteurs du magazine Animage qui récompense au japon le meilleur Anime de tout les temps! 1988, date à laquelle les chevaliers aboutissent en France et dans le Club Dorothée... Elle sera même deuxième en 1989, toujours lors du même concours, derrière un film de Miyazaki ! Etant donné que tout les films de Miyazaki ont obtenus la première place à ce classement (Sauf Mononoke Hime !) lors de leurs sorties, on est en droit de considérer Saint Seiya à la première place en 1989 également ! La Série cartonne aussi bien en France que dans de nombreux pays européens, voire dans le monde ! L'audience est néanmoins instable, mais les goodies se vendent comme des petits pains (le phénomène "armures Bandaï" !).... Une époque bénie entre toutes.

La fin du Mythe...

Mais voilà.... Toutes les belles choses ont une fin. Et les combats épiques de nos héros ont finis par lasser les télespectateurs nippons. L'audience est en chute libre et Bandaï refuse de produire l' "après-poseïdon" (la société ne s'engage qu'à la commercialisation du produit... Ils sont malins chez Bandaï !)... Il n'en faut pas plus pour que la belle aventure se termine sur l'épisode 114, concluant l'adaptation sur la défaite de Julian Solo. Nos héros, perchés sur une falaise, regardent au loin.... Vers quelque chose qui s'éloigne... Le Manga prend définitivement de l'avance... Les héros "animés" voient leur "eux-même" de papier combattre face à d'étranges chevaliers à l'armure sombre... Mais cela ne les concerne plus !

La légende continue ...

Le problème de Saint Seiya, comme toutes les excellentes et longues séries, aura été d' atteindre trop vite le sommet ! La Bataille du Sanctuaire a déchaîné les passions, et tout ce qui devait suivre en resortirait comme un peu.... "fade". Comment faire mieux alors que la renommée a déjà été atteinte ? Et ceci est valable également pour Kurumada et son manga, même si sa chute s'est produite un chapitre plus tard ! Saint Seiya s'est finallement asphyxié lui-même, pour le plus grand malheur des millions de fans à travers la planète... Mais une nouvelle ère est sur le point de s'ouvrir. 15 ans après le début de la série, les OAV Saint Seiya Hades Jûnikyû-hen s'apprêtent à débarquer au Japon. Immortel Saint Seiya !

Insider

Le texte qui suit est une traduction tirée de la "Worklist" du site Kunion's Café, le site de Kunio Tsujita (responsable de la mise en couleur des cellulos sur Saint Seiya et futur responsable des couleurs sur les OAV Saint Seiya Hades Jûnikyû-hen !). J'avais toujours désiré traduire ces infos exclusives sur ambiance "Making-Of" de ce site.

" Saint Seiya : la première série de télévision nationale dont je fut chargé à partir d'août 1986. A l'époque, Mr Morishita proclamait encore "Oh, ce genre de série ne tiendra que deux saisons (NDT : 26 épisodes)" mais quand on a ouvert le couvercle, on a eu l'énorme succès !! Le monde est ainsi fait !

"A la mise en scène nous avions Mr. Morishita pour nous diriger et Mr. Katsumata, Mr. Akehi, Mr. Yamauchi et tous ces autres metteurs en scènes très représentatifs de la Tôei.
Au niveau graphique, nous avions des troupes incroyables à commencer par le studio Araki Production, et ils s'inspiraient les uns les autres à chaque épisode et s'amélioraient toujours. A cette époque, la règle de base voulait que ce soit le Bijutsu kantoku (Directeur artistique) qui détermine les couleurs des personnages, chose que faisait Mr. Tadao Kubota au début de la série mais dont je fus chargé en cours de route. En fait j'avais toujours été un grand fan de celui qui s'était occupé de la direction artistique du film Ginga Tetsudô 999 (Galaxy Express 999 "), à savoir Tadao Kubota et son Studio Mukuo (NDT : le studio de feu Takamura Mukuo), et j'étais très nerveux au début. Car travailler avec des gens que l'on a toujours admiré… ! C'était extraordinaire !

Je me suis en fait occupé des épisodes 1, 26, 29 à… ? Je ne suis même pas sûr de pouvoir vous dire sur combien d'épisodes j'ai travaillé. A l'époque, la structure de production de la Tôei était en cours de mutation et nous nous sommes mis à commander l'intervallisation et les finitions d'épisodes à une entreprise de Taiwan nommée Daigan Dôga à partir de l'épisode 26 et c'est moi qui donnait les directives pour les couleurs pour chaque épisode dont ils étaient chargés. Et je me rappelle qu'après avoir fait un peu ce que nous voulions, moi et Mr. Yamauchi sur cet épisode 26, nous nous sommes fait vertement sermonner. J'ai fait tout ce que je pouvais et tout ce que je voulais sur cette œuvre avec Yamauchi. Il y a encore des choses dont je ne vous ai pas encore parlé à propos des films mais en tout cas c'est à partir de ce moment que les gens se sont mis à murmurer "si l'on met Yamauchi et Tsujita ensemble, ce travail déjà compliqué va se transformer en descente aux enfers !".

"En tout cas, je suis ce que je suis maintenant grâce à cette œuvre."

Merci à Nicolas Priet

 

Aussi :

Le Staff Technique !

Entretients avec le Staff

La Grande Bataille du Sanctuaire !

Asgard : Epopée Nordique

Poseïdon : L'Empereur des Océans

Hadès : L'Empereur des Ténèbres

 

[HOMEPAGE] [MUSIQUES] [ASGARD] [FILMS] [HADES] [DOUBLAGE] [HYPERMYTH] [SERIE] [PERSONNAGES] [MYTHOLOGIE] [COLLECTION] [ARAKI] [FORUM] [SENTIMENTS] [KURUMADA] [STORY-BOARD]

 

*Ludovic Gottigny. Tous droits réservés*